Cette technique agricole traditionnelle, qui consiste à défricher une terre par le feu et, du même coup, à fertiliser le sol grâce à la cendre ainsi créée, est très ancienne et considérée comme primitive en Asie du Sud-Est.
Ce mode de culture est très répandu surtout dans les zones montagneuses et reculées par opposition aux systèmes rizicoles irrigués des plaines et des vallées.
Cependant, c’est un système agraire controversé, très critiqué de la part des environnementalistes puisque le brûlis génère une dégradation durable des sols et la déforestation notamment.
En Asie du Sud-Est, la culture sur brûlis fait partie des plus anciens systèmes agraires. On trouve trace de cette pratique d’essartage 2000 ans avant Jésus Christ. Dans les zones de forêt tropicale, le couvert forestier est si dense qu’il est très difficile pour les populations locales de défricher, surtout que celles-ci disposent d’aucune mécanisation et ne possèdent que très généralement des outils rudimentaires, pour exécuter une tâche ô combien longue et pénible.
Afin d’aménager des clairières de cultures, appelées ray, les paysans élaguent dans un premier temps les arbres de la parcelle choisie au début de la saison sèche. Au moment le plus sec et le plus chaud de l’année, sans dessouchage, les débris végétaux sont séchés au soleil puis brûlés, tout comme les autres végétaux non souhaités, pour dégager de l’espace et apporter de la lumière aux futures cultures. Les cendres obtenues par la combustion des végétaux sont riches en carbone et en éléments minéraux et vont fertiliser les sols. Sur la parcelle ainsi nettoyée, les paysans sèment leurs cultures sans labour dès les premières pluies afin de faire pénétrer la pluie dans le sol.
La parcelle est cultivée de 1 à 3 ans avec comme première culture le riz ou le maïs généralement. Après la première année les sols s’appauvrissent, obligeant les agriculteurs à choisir des plantes moins gourmandes en nutriments comme des fruits, légumes, épices ou condiments. Puis, les sols deviennent totalement stériles, alors les agriculteurs sont contraints de défricher une autre zone. Ils laissent la parcelle au repos pour se régénérer. De 15 à 40 ans de jachère sont nécessaires pour être de nouveau exploitable. C’est donc une agriculture itinérante qui nécessite de trouver de nouvelles zones à exploiter. C’est ainsi que certaines tribus montagnardes du nord du Laos et du Vietnam déplacent leurs villages tous les 10 ou 20 ans, lorsqu’ils ont exploité toutes les forêts des environs laissant derrière eux des terres incultivables pendant des dizaines d’années. Dans ce cas précis on peut vraiment parler d’agriculture itinérante.
Bien que critiquée, la culture sur brûlis est vitale pour certaines populations isolées et viable dans les zones à faible densité de population. Malheureusement, l’explosion démographique importante en Asie du Sud-Est pousse les paysans à raccourcir le temps de jachère et à chercher toujours plus de sols cultivables. À terme, en cas de pression démographique trop importante, le brûlis peut avoir des conséquences écologiques désastreuses : disparition de la forêt, destruction d’un capital ligneux et d’une riche biodiversité, baisse de la fertilité du sol et augmentation de l’érosion.
Le brûlis détruit aussi une partie de la micro-faune vivant dans les couches superficielles du sol. C’est également un véritable fléau pour la grande faune dont l’espace de vie est toujours plus réduit.
La culture sur brûlis a des répercussions sur la santé des habitants chez qui les fumées provoquent des pathologies respiratoires. Fumées qui contribuent également largement à émettre des gaz à effet de serre.
Si la culture sur brûlis a été combattue par l’administration coloniale française puis par les différents gouvernements des états de la péninsule indochinoise, elle demeure car elle est parfois le seul moyen de subsistance de certaines populations, notamment les minorités ethniques qui vivent dans les régions les plus escarpées, les plus difficiles à cultiver. Aussi cette technique ancienne persiste à cause de son efficacité et de sa rapidité.
Quoi qu’il en soit, il est urgent de trouver rapidement une solution pour remplacer ce système agraire, traditionnel certes mais très souvent dévastateur, avant que trop de forêt n’ait définitivement disparu ainsi que sa population faunique et florale dans une région où elle joue un rôle essentiel.