Le Haut-Laos (Nord-Est Laos, provinces de Houaphan et de Xieng Khouang) est une des régions les plus mystérieuses de l’Indochine péninsulaire, de par son isolement séculaire, l’éclat de ses massifs, ses forêts ancestrales, ses groupes ethniques, les énigmes flottant au-dessus de l’antique civilisation mégalithique et des épisodes ahurissants de la guerre secrète américaine, notamment la prise et la chute du Mont Phu Pha Thi.

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Les hautes falaises calcaires de la face sud du Phu Pha Thi

Une montagne aux allures de forteresse

Le Phu Pha Thi se situe au nord-est du Laos, dans la province de Houaphanh, au cœur du massif-parc national de la Nam Et. Le mont, à l’allure d’une forteresse calcaire culmine à 1786 mètres et ressemble à un monolithe géant de huit kilomètres de long orienté sur un axe nord sud-est ; il est ceinturé au nord et à l’est de hautes falaises calcaires, à l’ouest par d’autres falaises et de la forêt dense, domaine de tigres et panthères, et au sud par la piste de Sam Neua. Couronné d’un étroit plateau de quatre cent à cinquante mètres de large, il surplombe au nord la rivière Nam Et. C’est le site de la célèbre bataille du mont Phu Pha Thi, également connu sous le nom de Lima Site 85 ou de The Rock, une des affaires les plus mythiques de la guerre secrète au Laos.

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La forêt dense ceinture le Phu Pha Thi sur sa face ouest.

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Le Phu Pha Thi surplombe la rivière Nam Et sur sa face nord.

Une montagne sacrée

Vu son étrange et impressionnante apparence, il est depuis toujours sacralisé et interdit par les groupes ethniques voisins, Khmu, Dao et Hmông, ces derniers y voyant la résidence des Phi (les génies). Par sa configuration chaotique, sa sacralisation, son destin et les circonstances de son attaque finale, le Phu Pha Thi peut se comparer à Montségur, la fameuse citadelle cathare : durant la guerre secrète au Laos, la CIA transforme son sommet en une base théoriquement imprenable, à cette époque une des bases les plus secrètes au monde, pour être finalement, et comme la citadelle albigeoise, assaillie par l’improbable voie des falaises.

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Par sa configuration chaotique, sa sacralisation, son destin et les circonstances de son attaque finale, le Phu Pha Thi peut se comparer à Montségur, la fameuse citadelle cathare, dans l’Aude, en France.

Le déroulement de la bataille du Phu Pha Thi

Le Phu Pha Thi est utilisé comme base par le Corps expéditionnaire français, puis, en aout 1966, ce afin de supporter la guerre aérienne contre le Nord Vietnam, le Nord Laos et les environs d’Hanoi, la CIA y installe un système de radar (TACAN), provocation insensée puisqu’à cette époque le mont sacré se trouve en plein territoire du Pathet Lao, à quelques kilomètres de Sam Neua, de la frontière nord-vietnamienne et de Hanoi. Aux vues des restrictions placées sur la présence militaire américaine au Laos, le Phu Pha Thi, d’autres Lima Sites dont le fameux 20A (Long Cheng) et la guerre secrète deviennent la propriété exclusive de la CIA.

En 1967 un autre système radar plus sophistiqué est installé (Combat Skyspot AN/TSQ), nom de code Commando Club, il permet d’assister l’USAF, de contribuer aux opérations de bombardement, notamment Rolling Thunder et Barrel Roll (bombardements de la Piste Ho Chi Minh. Outre ses hautes falaises, le Phu Pha Thi est défendu par huit cent Hmông de l’Armée secrète hmông, par trois cent mercenaires thaïs, la station radar est opérée par une quinze d’opérateurs américains, par quelques membres de la CIA, ravitaillée par Air America ou les Ravens. Cette présence devient rapidement intolérable pour l’Armée nord-vietnamienne qui organise en janvier une première attaque via deux Antonov An-2. Ces derniers abattus, les Vietnamiens organisent une approche plus stratégique et commencent à méthodiquement encercler le mont.

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“An Air Combat First”, une peinture de Keith Woodstock représentant la bataille du Phu Pha Thi en 1968.

Entre janvier et mars s’en suit une série d’engagements féroces sans issues décisives, finalement, le 11 mars, des commandos vietnamiens appuyés de Hmông-rouge réussissent à gravir les falaises et assaillir la base par où personne ne pense qu’une attaque est réalisable. La surprise est totale, en quelques heures la base est perdue, l’évacuation du personnel du radar est un fiasco. Durant les deux mois qui s’en suivent, afin d’effacer toutes traces suspectes, les Américains via quatre-vingt-quinze sorties aériennes bombardent et détruisent le site. Du côté américain le Lima Site 85 reste classifié jusqu’en 1983, du côté laotien, le mont reste fermé, base militaire, interdit, classé comme hautement sensible jusqu’à son ouverture en 2018, date de sa réouverture.

Perspectives

Depuis de nombreuses années, Amica JSC considère et étudie le site, en 2013 il y organise un premier pré-repérage en sa bordure méridionale, puis en janvier 2018 un repérage sur ses hauteurs et flancs occidentaux. Depuis un ancien point d’appui du sud du mont, un escalier de mille marches permet de désormais accéder au sommet et à l’ancienne base, des formules aventure sont organisables sur ses flancs, le long de la rivière Nam Et. L’excursion au Phu Pha Thi – Lima Site 85 peut s’effectuer lors d’un voyage Nord Vietnam – Nord Laos ou depuis Luang Prabang.

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Un escalier de mille marches permet d’accéder au sommet du Phu Pha Thi.

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